LUTTE
CONTRE LA PIRATERIE AU MALI
Les producteurs comblent l'insuffisance du Bumda
Dans
la lutte contre la piraterie, les producteurs maliens ont apparemment
compris qu'ils ne peuvent plus attendre grand-chose du Bureau malien
du droit d'auteur (BUMDA). Ils s'organisent en conséquence
pour mener des opérations de saisie dans les marchés
de Bamako. C'est ainsi que le 29 octobre dernier, certains membres
de l'Association des producteurs phonographiques du Mali (APPM), en
collaboration avec des agents du commissariat du 1è Arrondissement
ont effectué une opération fructueuse au Dabanani, le
centre des affaires et de la contrebande du grand marché. Cette
opération a permis de saisir 3 420 cassettes piratées.
Une prise qui comporte toutes les œuvres à succès
de ces deux dernières années. Au cours de cette opération,
les agents du commissaire Amy Kane ont également arrêté
deux personnes très mouillées dans la piraterie. Bien
cuisinés, ceux-ci ont à leur tour dénoncé
deux de leurs complices qui sont aujourd'hui aux arrêts. Pis,
ces dénonciations ont permis de mettre la main sur un individu
en possession d'un lot impressionnant de jaquettes des artistes maliens.
Pris en flagrant délit, il s'est également mis à
table et ses complices sont aujourd'hui activement recherchés
par les policiers. Selon le pirate arrêté, ces jaquettes
viendraient du Nigeria sur la commande de commerçants maliens
(Confession sincère ou tentative de brouiller les pistes?).
Les enquêteurs s'activent maintenant à remonter la filière.
Au fil de cette enquête, il faut s'attendre à ce que
d'autres têtes tombent.
Et pas les moindres parce que cette opération de l'APPM et
du 1er arrondissement a sérieusement ébranler le réseau
de la piraterie. Ceux qui tirent les ficelles dans l'ombre ne se sentent
plus invulnérable. Ne se sentant plus en sécurité,
ils sont en train d'activer leur réseau de corruption afin
de bloquer l'enquête. Mais, c'est sans connaître la détermination
et la pugnacité du commissaire Amy Kane qui a déjà
démantelé assez de réseaux de mafieux et de bandits
armés. En tout cas tant que l'affaire est à son niveau,
les producteurs ne craignent rien. La crainte se situe au niveau du
transfert parce que toutes les actions visant à démanteler
les réseaux de pirates ont mystérieusement échoué
au niveau de la justice. Déjà des magistrats se disent
prêts à récupérer les cassettes saisies,
c'est-à-dire les preuves, contre de fortes commissions.
On se rappelle qu'avant l'action des producteurs, le Bumda avait mené
une opération du genre au Dabanani. Le 1e arrondissement a
fait son enquête et a réuni des preuves concrètes
contre les pirates arrêtés. Déférés,
ceux-ci se sont curieusement retrouvés en liberté provisoire
le lendemain. Les vrais acteurs du réseau étaient passés
par là. Cette foi-ci, les producteurs ne s'en laissent pas
compter. Ils ambitionnent aujourd'hui de se donner les moyens de s'adjoindre
les services des meilleurs avocats du pays pour barrer le chemin aux
complices des pirates au niveau de la justice.
La réussite de l'opération de l'APPM prouve une fois
de plus l'incompétence du Bumda qui se cache toujours derrière
le manque des ressources (logistiques, financières et humaines)
pour justifier son inefficacité. Les producteurs viennent de
démontrer qu'avec peu de moyens mais une réelle ambition
de combattre le fléau, qu'on pouvait marquer des points contre
ceux qui se livrent aujourd'hui à ce travail ignoble. Mieux,
au cours d'une journée, le Bumda n'était parvenu à
saisir qu'environ un millier de cassettes. Alors qu'en une heure trente,
les producteurs ont mis la main sur 3 420 œuvres piratées
et deux malfrats qui ne cessent de dénoncer leurs complices.
Comme on peut facilement le constater, la lutte contre la piraterie
est devenu aujourd'hui l'affaire des seuls producteurs et du ministre
Cheick Oumar Sissoko. Et pourtant, ce combat n'est pas seulement culturel.
Sa répression nécessite l'implication des départements
de la Justice et de la Sécurité intérieure ainsi
que de l'Economie et des Finances. D'où aujourd'hui la nécessité
de créer une commission interministérielle contre le
piratage des œuvres artistiques. Un fléau qui fait perdre
des milliards de CFA au Trésor public et condamnent les créateurs
à la misère. Comme on l'a fait contre la corruption,
l'ampleur de la piraterie doit pousser les autorités à
désigner un Magistrat spécialement chargé de
combattre ce fléau. Ce qui n'est malheureusement pas prêt
de se réaliser parce que la lutte contre la piraterie demeure
toujours dans les discours et non dans des actes concrets.
La Rédaction