Soungalo Coulibaly
Maître Djembé "Jenbéfola"
Djembe master
 

A la fin des années 1970 apparaît en Europe un instrument de percussion encore quasiment méconnu. Vierge de toute compromission artistique - le concept de world music n'est alors pas né - absent même de l'arsenal des batteurs les plus éclectiques, il est l'apanage de quelques rares musiciens émigrés, originaires d'Afrique de l'ouest. Mais d'emblée, il exerce une fascination particulière. La richesse et la variété de ses timbres, la profondeur de ses basses en font bientôt l'instrument rêvé des percussionnistes occidentaux. Quelques précurseurs se rendent alors en Côte d'Ivoire, en Guinée ou au Mali, à la recherche de maîtres tambours, dont certains ont déjà parcouru le monde ou sein des ballets nationaux. Ceux-ci et d'autres, qui au contraire ne sont pour ainsi dire jamais sortis de chez eux, amènent avec eux, dès leurs premiers voyages en Europe, les accents irrésistibles d'une culture rythmique trop longtemps négligée et comme attendue par un public occidental avide de nouvelles expériences musicales.
A peine importée, la passion se répand comme une traînée de poudre. Désormais utilisé par la plupart des groupes musicaux et des ballets d'Afrique de l'ouest, du Sénégal ou Burkina-faso, il est en passe de devenir un des instruments ethniques les plus populaires ou monde. La légende du djembé (
Jenbé) est lancée.

Origines et traditions
Sous sa forme la plus répandue, le djembé est un instrument d'origine malinké (Guinée, Mali, Sénégal, Côte d'Ivoire), mois on le trouve également chez un bon nombre de groupes ethniques voisins. Dioula, Bambara, Soussou, Baga, Landouma, Peuls, Sarakolé, Bobo et Sénoufo... C'est un tambour taillé en forme de calice dons une seule pièce de bois (traditionnellement linge ou lènke) et monté d'une peau de chèvre tendue par un système de cordes croisées entre deux filets. l'un est fixé au bas du calice et l'autre au bord de la peau. On en joue à mains nues, après avoir chauffé au feu la peau pour en augmenter la tension. Cette dernière opération tend toutefois à disparaître car les musiciens trouvent aujourd'hui des cordes de meilleure qualité, capables de subir des tractions beaucoup plus fortes, mais moins traumatisantes que ne l'était la tension provoquée par la chaleur. Pour enrichir la palette sonore déjà variée de l'instrument et lui donner le grésillement si cher aux oreilles mandingues, on y adjoint volontiers deux ou trois sonnailles composées chacune d'une feuille de métal garnie d'anneaux également métalliques et, parfois, de grelots.
Comme tout tambour africain, le djembé parle dans les langues des différents groupes ethniques qui l'utilisent traditionnellement. Ainsi, par exemple, les sons émis par les différentes frappes du batteur correspondent parfaitement aux accentuations de la langue malinké. L'instrumentiste est d'ailleurs appelé jenbéfola, celui signifie littéralement "celui qui fait parler le djembé" Il utilise le djembé pour rythmer la danse, lors des fêtes qui marquent les moments importants de l'année et les rites de passages (baptêmes, circoncisions, mariages, funérailles). Le soliste est généralement secondé par un ou plusieurs djembés d'accompagnement, par un ou plusieurs tambours de basse (qu'on appelle dunum ou kenkeni , selon les régions) et par un nombre variable de cloches ou de tubes métalliques frottés (karinian) ou frappés (kenken), chaque instrumentiste jouant sa partie rythmique propre qui s'inscrit en polyrythmie par rapport aux autres. Responsable de l'accompagnement rythmique du chant et de la danse (deux éléments indissociables, que les Bambara regroupent sous un concept unique, donkili), le jenbéfola doit connaître parfaitement son répertoire et chacune des parties instrumentales qui le composent. Tantôt c'est lui qui, par ses formules rythmiques, va suggérer son pas au danseur, tantôt c'est celui-ci qui lui impose son propre rythme et l'oblige à le suivre. Ce travail musical ne demande pas seulement d'excellents réflexes et beaucoup de concentration de la part du soliste, mais il exige d'énormes ressources physiques, la fête pouvant durer plusieurs heures, voire la nuit entière.

Soungalo Coulibaly
Tous les maîtres de la tradition du djembé sont d'accord au moins sur un point essentiel: ce n'est pas au batteur lui-même de s'autoproclamer jenbéfola, mais bien aux acteurs du milieu culturel traditionnel d'en décider, les danseuses, lors des fêtes, et les autres maîtres tambours déjà reconnus. A cet égard, Soungalo Coulibaly, avec sa personnalité charismatique, son sens de la répartie rythmique, son génie créatif, son goût de la surprise et sa musicalité généreuse, fait à coup sûr l'unanimité.
Les percussionnistes ouest africains les plus fameux et les plus respectés, de Doudou N'Diaye Rose à Mamady Keïta, en passant par Famoudou Konaté, Adama Dramé, Fadouba Oularé ou Maré Sanogo, s'accordent à le considérer comme un des plus grands représentants de la tradition mandingue du djembé. Bambara de pure souche - son père était chef du village de Béléko, à une centaine de kilomètre de Ségou, dans le Baninko (Mali) - Soungalo Coulibaly est né en 1955 et a été élevé dans la plus pure tradition bambara. Batteur de bara et de sabani dès son plus jeune âge, il joue pour accompagner les travaux des champs et les fêtes populaires.
Quittant Béléko pour la ville de Fana, puis pour la Côte d'Ivoire, il apprend le djembé en autodidacte, saisissant chaque occasion d'accompagner les jenbéfola qu'il rencontre dans les fêtes et "volant" leur musique. Lorsqu'il s'établit à Bouaké dans le milieu des années 1970, il s'impose tout de suite grâce à sa musicalité remarquable et à sa capacité de s'adapter à tous les styles. Ces mêmes qualités lui valent depuis lors d'être régulièrement invité en Europe pour y donner des concerts avec son ensemble et diriger des stages. Ses trois précédents CD sont considérés par ses pairs comme des références.

Les enregistrements (L'Art du Djembé)
Pour ce nouveau disque, le premier entièrement consacré par Soungalo au seul répertoire traditionnel du djembé, nous avons choisi d'enregistrer le maître tambour dans son contexte le plus traditionnel: sa cour familiale, à Bouaké. Nous avons essayé de restituer autant que possible l'incroyable dynamique du djembé solo, sa formidable palette sonore, ainsi que le caractère "parlé" et "chanté" de sa musique.
Le tambour de Soungalo a donc été mixé bien en avant, tel que l'entendrait une danseuse au milieu du cercle de la fête, tel que le soliste lui-même le perçoit. Chaque nouveau rythme a fait l'objet de nouveaux développements inattendus, sources de nouvelles surprises non seulement pour les batteurs qui n'avaient jamais rien entendu de tel, mais aussi pour les quelques griots présents, au jugement toujours critique. Avec calme et sans tapage, remodelant les rythmes à sa convenance tel un Coltrane du djembé, Soungalo Coulibaly fait avancer la tradition !

Textes Vincent Zanetti (extrait de l'Art du Djembé)

Web : www.soungalo.com

Contact scène : djinn@smartfree.ch

 
2002
"L'Art du Djembé"
Arion ARN 60590
" Laïla ilala"
Arion ARN 64192
2001
"Dengo"
Arion ARN 64544
   
1999 Musiques et rythmes du Mali
"Sankan Wulila"
Arion ARN 64491
   
The djembe (or jenbé) - a percussion instrument virtually unknown at that time outside its native Africa - appeared in Europe towards the end of the 1970s. Untainted by artistic compromise - the concept of world music did not yet exist - and as yet absent from the arsenal of drummers of every allegiance, it was then the privilege of a few rare musicians from West Africa. But the djembe last no time in casting its spell.
The wealth and variety of its timbres, the richness of its basses, soon made it the ideal instrument for Western percussionists. Some of them travelled to Côte d'Ivoire, Guinea or Mali in search of master drummers, some of whom had already travelled worldwide with their national dance companies. These, and others who had virtually never left their homes before, brought to Europe the irresistible sounds of a rhythmic culture, to which Western audiences, eager far new musical experiences, proved to be very receptive. From then on, the instrument's popularity spread like wildfire.
Found in most West African groups and dance companies, from Senegal to Burkina Faso, it is now set to become one of the world's most popular ethnic instruments. The djembe is on the way to becoming a legend.

Origins and traditions
In its most common form, the djembe is an instrument of Malinke (Manding) origin (Guinea, Mali, Senegal, Côte d'Ivoire), but if is also found among neighbouring ethnic groups, Dioula, Bambara, Soussou, Baga, Landouma, Peul, Sarakole, Bobo and Senoufo. The djembe is a goblet drum carved from a single piece of wood (traditionally linge or lènke) and with a goatskin head held firmly in place by a system of lacing.

It is played with the bare hands, sometimes after heating the skin with a flame to increase the tension - an operation that has become unnecessary with the advent of better quality cords, capable of holding the membrane sufficiently taut. To enrich the instrument's already very varied sound palette, two or three pieces of metal, bearing metal rings (and sometimes small bells), are fixed vertically around the head; the sékéséké, as they are known, vibrate as the musician plays, creating an accompanying jingling sound. Like many African drums, the djembe is traditionally used as a means of communication, a means of conveying messages. The different strokes are used to reproduce the stress patterns of the spoken language, i.e. the language is used as a basis for rhythm. The word djenbefola - used far the player - reflects that use, its literal meaning being 'he who makes the djembe speak'. The djenbefola uses the djembe to provide rhythm for dancing at various celebrations throughout the year and at ceremonies relating to the cycle of life (baptism, circumcision, weddings, funerals...).
The soloist is usually backed by one or more accompanying djembes, one or more bass drums (dunum or kenken (Konkoni in Bambara) and by a variable number of bells or metal tubes which are scraped (karinian) or struck (kenken). The result is polyrhythmic, with each musician playing his own rhythmic part. The djenbefola is responsible for the rhythmic accompaniment of the singing and the dancing (these are indissociable, and the Bambara concept of donkili covers both); he therefore has a perfect grasp of the repertoire and of each of the instrumental parts. Sometimes the djenbefola uses rhythmic formulas to suggest steps to the dancer; sometimes the latter imposes his or her own rhythm, obliging the musician to follow. Playing the djembe calls not only for excellent reflexes and great concentration on the part of the soloist, but also for great stamina: celebrations may go on for hours, sometimes all night.

Soungalo Coulibaly
Masters of the djembe tradition all agree on at least one essential point: it is not for the drummer to declare himself a djenbefola.
That title can only be conferred on him by the other members of the same traditional cultural milieu: the dancers who take part in the various celebrations and other master drummers of repute. And Soungalo Coulibaly, with his charismatic personality, his sense of rhythmic repartee, his creative genius, his aptitude for creating surprise, and his generous musicality, wins unanimous support.
The most famous and most respected West African percussionists, from Doudou N'Diaye Rose to Mamady Keïta, not forgetting Famoudou Konaté, Adama Dramé, Fadouba Oularé and Maré Sanogo, all agree that he is one of the greatest exponents of the Manding djembe tradition.
Of Bambara origin - his father was head of the village of Béléko (about a hundred kilometres from Ségou, in the Baninko region, southern Mali) - Soungalo Coulibaly, born in 1955, was brought up in the purest Bambara tradition. Like most traditional drummers, he gained his first musical experience at a very early age by accompanying work in the Fields and playing at village celebrations on the bara and the sabani. He left Béléko for Fana, then for Côte d'Ivoire, and taught himself to play the djembe, seizing every opportunity to accompany the djembefolaw he met at celebrations, and adopting their music. When he moved to Bouaké (Côte d'Ivoire) in the mid-seventies, he immediately earned a name for himself through his remarkable musicality and his ability to adapt to all sorts of different styles. Those same qualities led to recognition in Europe, where he regularly presents concerts with his group, as well as giving courses. His three previous CDs are regarded as references by his peers.

This recordings (The Art of the Jembe)
For this new recording, the first one entirely devoted to the traditional djembe repertoire, we decided to record the master drummer in his most traditional context, i.e. in the courtyard of his home at Bouaké.
We have done our utmost to capture the extraordinary dynamics of the solo djembe, its wonderful palette of sound, as well as the 'spoken' or 'sung' character of Soungalo's music. Soungalo's drum is heard as a dancer would hear if as she moves in the middle of the circle at a celebration, or as the soloist himself hears if. Each new rhythm led to new and unexpected developments, which surprised not only the other drummers, who had never heard anything like if, but also the griots who were present -and griots are noted for the severity of their criticism! Calmly and imperturbably, Soungalo Coulibaly - the John Coltrane of the djembe -reshapes the rhythms to his liking and takes tradition into the future...

Texts Vincent Zanetti
(extract from The Art of Jembe)

Web : www.soungalo.com
Stage infos : djinn@smartfree.ch

P 04/03/2004